Mouches noires
(simulies)
Classification
Description des adultes
Cycle de vie
Habitat
Distribution géographique
Alimentation
Rôles écologiques
Comportements particuliers
Méthodes de contrôle
Croyances populaires
Questions fréquemment posées
Faits intéressants et curiosités
Bibliographie
CLASSIFICATION
Phylum : Arthropodes
Classe : Insectes
Ordre : Diptères
Famille : Simuliides
Nom anglais : Black flies (blackflies, black-flies, buffalo gnats, turkey gnats)
Nombre d'espèces au Québec : On compte 70 espèces de simulies dûment identifiées dans la province. Il y en a plus de 150 en Amérique du Nord et plus de 1 500 dans le monde. On estime que des centaines, sinon des milliers d'autres espèces de mouches noires s'ajouteront à ce nombre car les entomologistes ne cessent d'en découvrir.
ESPÈCES APPARENTÉES
D'autres insectes de l'ordre des Diptères se nourrissent de sang et appartiennent à des familles proches de celle des mouches noires. Il s'agit des culicides (les moustiques), des tabanides (les taons, frappe-à-bord, mouches à chevreuil, mouches à cheval et mouches à orignal) et des cératopogonides (les brûlots).
N.B. Dans le langage courant, on qualifie d'insectes piqueurs les membres des familles mentionnées ci-dessus. Pour les entomologistes, par contre, seules les femelles des moustiques piquent vraiment (avec leurs pièces buccales), alors que les autres insectes hématophages mordent. La « piqûre » de la mouche noire est donc en fait une morsure.
DESCRIPTION DES ADULTES
Les simulies sont des petites mouches trapues dont l'envergure varie entre 1,4 et 6 mm. Malgré leur nom, les mouches noires ne sont pas toutes de cette couleur. Il est vrai qu'elles sont souvent noires ou brun foncé mais, chez certaines espèces, le gris, le brun rouge, le jaune ou l'orangé dominent.
La tête porte deux gros yeux composés qui couvrent presque toute sa surface. Chez la femelle, les yeux sont séparés l'un de l'autre, alors qu'ils se rejoignent chez le mâle. Les facettes des yeux de la femelle sont toutes de la même taille. Chez le mâle, les facettes de la partie supérieure de l'œil sont plus grosses que celles du bas.
Les antennes sont courtes et plus ou moins cylindriques.
Les pièces buccales de la femelle, très courtes mais très coupantes, sont adaptées pour cisailler la chair et aspirer le sang. Ses stylets se terminent par une dent, qui est absente chez le mâle qui ne mord pas (chez certaines espèces, les simulies des deux sexes n'absorbent jamais de sang).
Le thorax est arqué et donne aux mouches noires un profil de bossu caractéristique.
Francine Mondor
Les six pattes sont plutôt courtes. Selon les espèces, elles ont une teinte uniforme ou sont rayées de bandes blanches.
Comme les autres diptères, les mouches noires ont une seule paire d'ailes fonctionnelles. Elles sont plutôt courtes et larges, et dépourvues d'écailles. Les ailes postérieures sont réduites à l'état de moignons appelés balanciers ou haltères.
L'abdomen de ces insectes est particulièrement extensible chez les femelles qui doivent absorber des repas sanguins.
CYCLE DE VIE
Le cycle vital des mouches noires présente de nombreuses variations selon les espèces. Toutes sont des insectes à métamorphose complète, ou holométaboles. Les stades de l'œuf, de la larve et de la nymphe sont aquatiques, alors que l'adulte est aérien. Sauf de rares exceptions, le développement de ces insectes nécessite la présence d'eau courante.
Les mâles et les femelles s'accouplent au sol peu après leur émergence. Chez la plupart des espèces, la femelle doit absorber un repas de sang pour que ses œufs puissent atteindre la maturation nécessaire.
La ponte s'effectue différemment selon les espèces. Certaines femelles volent au-dessus de la surface de l'eau et laissent tomber leurs œufs un à un. Ils coulent ensuite au fond. D'autres pondent quelques œufs à la fois, en petits groupes, en se posant sur des surfaces solides (roches, plantes aquatiques). D'autres encore pondent des œufs en chaînes ou petits amas tout en se promenant sur une surface légèrement submergée. Enfin, certaines espèces pondent tous leurs œufs au même endroit, en couche uniforme. Dans ce cas, les œufs sont généralement placés à la verticale, appuyés les uns contre les autres et posés sur une de leurs extrémités.
Les femelles semblent vivre de trois à quatre semaines en nature, ce qui leur permet d'effectuer plusieurs pontes.
Les œufs mesurent de 0,15 à 0,3 mm de long. Ils ont un renflement distinctif sur un des côtés. D'abord blancs, ils deviennent plus foncés à mesure que leur occupante se développe.
Francine Mondor
La larve aquatique des mouches noires se reconnaît aisément. Elle porte sur sa tête une paire de larges brosses labiales qui s'ouvrent comme des éventails. Ces brosses sont réduites ou absentes chez quelques espèces. La larve se distingue aussi par la présence de deux fausses-pattes, ou pseudopodes : l'une d'elles est située sur le thorax, près de la tête, et l'autre forme l'extrémité postérieure de l'abdomen. On trouve au bout de chacune de ces fausses-pattes un petit disque formé de minuscules crochets. De courtes branchies rétractiles, situées près de l'anus, permettent à la larve de respirer sous l'eau.
Selon les espèces, la larve mature atteint de 4 à 12 mm de long. Son développement nécessite entre six et neuf mues, habituellement sept, et parfois jusqu'à onze. Elle vit la plupart du temps fixée sur une herbe, une racine ou un autre support végétal, ou encore sur une pierre ou sur un fond rocheux.
Lorsque la larve mue pour se transformer en nymphe, elle reste d'abord abritée dans son exuvie (sa vieille « peau »), gardant ainsi quelque temps une apparence larvaire. La nymphe tisse ensuite un cocon à l'aide de la soie produite par ses glandes salivaires. La formation de cet abri prend normalement de 40 à 60 minutes. Il est ouvert à une extrémité, et sa forme varie en fonction du débit plus ou moins rapide des eaux où vivent les nymphes. Le cocon est fixé à un objet submergé, et parfois plus ou moins enfoui dans la vase.
Francine Mondor
La nymphe reste immobile dans son abri. Elle porte sur le thorax, derrière la tête, une paire de branchies de forme variable (plumeuses ou filamenteuses, par exemple), qui servent à absorber l'oxygène dissous dans l'eau. Des petits crochets situés sur son abdomen l'aident à demeurer en place dans le cocon. Le stade nymphal, plutôt court, dure généralement entre deux et six jours.
L'émergence de la mouche noire adulte ne nécessite que quelques minutes. L'adulte peut rester immobile à la surface de l'eau ou prendre son envol dès qu'il atteint l'air libre. Pour ce faire, la mouche peut grimper sur un objet qui se dresse hors de l'eau. Elle peut aussi monter vers la surface dans une bulle d'air après s'être libérée de son enveloppe nymphale préalablement gonflée de gaz.
Selon les espèces, ces insectes peuvent passer l'hiver à l'état d'œufs ou de larves.
Dans les régions tempérées froides et arctiques, les mouches noires produisent généralement une seule génération par année (espèces univoltines). On compte souvent de deux à quatre générations par an dans le sud du Québec, où l'hiver est moins rigoureux (espèces polyvoltines).
HABITAT
Ces insectes sont obligatoirement liés au milieu aquatique pour compléter leur cycle vital. Les larves vivent le plus souvent dans des ruisseaux ou des petites rivières de faible profondeur. On les trouve cependant dans presque tous les types d'eaux courantes : rapides ou lentes, calmes ou agitées, acides ou alcalines, riches ou pauvres en nourriture et en oxygène.
Des simulies ont été observées jusqu'à 4 500 m d'altitude dans les Andes et les hautes montagnes de l'Afrique de l'Est.
Certaines espèces spécialisées sont confinées à un habitat précis, alors que d'autres, moins exigeantes, peuvent vivre dans plusieurs milieux.
DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE
On trouve des mouches noires presque partout dans le monde où il y a des cours d'eau propres à leur développement. Elles vivent dans toutes les régions géographiques, de l'Arctique jusque sous les tropiques.
ALIMENTATION
Les larves se nourrissent en filtrant les particules en suspension dans l'eau à l'aide de leurs brosses labiales. Il leur arrive, rarement, de manger des larves de chironomides (autres petits diptères).
Quand les populations de larves de mouches noires sont denses, elles peuvent devenir cannibales et avaler des larves plus petites de leur propre espèce.
La grande majorité des femelles adultes prélèvent le sang de vertébrés à sang chaud. Chez certaines espèces, les femelles ne mordent pas.
Les mâles et les femelles adultes de toutes les espèces utilisent du nectar comme source d'énergie.
RÔLES ÉCOLOGIQUES
Les mouches noires, autant sous la forme de larves que d'adultes, font partie de plusieurs chaînes alimentaires. Elles constituent une abondante source de nourriture pour de nombreuses espèces de prédateurs, tant en milieu aquatique que terrestre. Dans l'eau, les stades immatures sont mangés par du zooplancton, des insectes, des poissons (truites et saumons), etc. Les adultes sont la proie d'insectes, de batraciens, d'oiseaux, de chauves-souris, etc.
Par leur nombre considérable, les mouches noires permettent de transférer une importante quantité de matière organique (biomasse) des milieux aquatiques aux milieux terrestres. Les larves de simulies s'alimentent de très petites particules dans les eaux vives puis se transforment en mouches adultes qui sont dévorées par divers prédateurs terrestres ou aériens.
De plus, les larves ne distinguent pas les particules qu'elles avalent et mangent souvent les boulettes d'excréments produites par les larves installées en amont dans la rivière. Elles jouent ainsi un rôle important dans le recyclage de la matière.
COMPORTEMENTS PARTICULIERS
L'irritante morsure de la femelle est généralement nécessaire à la reproduction des mouches noires. En effet, la plupart des espèces ne peuvent amener leurs œufs à maturité si elles n'absorbent pas de sang, qui leur sert de source de protéines. Certaines espèces, dites autogènes, ont développé la capacité de se passer du repas sanguin. La distinction n'est pas toujours claire, toutefois, car certaines mouches noires peuvent produire une première ponte sans absorber de sang mais en ont besoin pour les pontes qui suivent.
La femelle à la recherche d'une source de sang s'oriente probablement d'abord par la vue. Elle est attirée par les mouvements, la forme et les couleurs de sa proie. Puis entre en jeu la détection du gaz carbonique (CO2), produit par la respiration de la proie.
Une fois posée sur sa victime, la femelle la mord à l'aide de ses pièces buccales très spécialisées. Elle étire d'abord la peau avec son labre muni de dents apicales et la coupe avec ses mandibules en forme de lames à bout dentelé. Ensuite, l'hypopharynx perce la chair et y injecte un peu de salive. Ce liquide contient un anticoagulant qui rend le sang plus liquide et en facilite le pompage. D'autres pièces buccales pénètrent profondément dans le derme pour servir d'ancrage et maintenir la tête de l'insecte dans la peau. Le prélèvement de sang dure en moyenne entre trois et six minutes, mais souvent davantage (jusqu'à 15 minutes ou même plus). Généralement, la simulie absorbe au moins l'équivalent de son propre poids en sang. Selon les espèces, et en particulier chez celles qui s'attaquent aux mammifères, les insectes mordent souvent une partie spécifique du corps de l'hôte (ventre, oreilles, pattes, etc.).
La femelle prend normalement un autre repas sanguin après chaque ponte, au bout de quelques jours, afin d'obtenir les nutriments nécessaires à la prochaine production d'œufs.
Les femelles ne sont pas dépendantes du sang pour leur survie et elles s'alimentent souvent de nectar, comme les mâles.
Chez les espèces de mouches noires qui doivent absorber du sang, la majorité montre une préférence, sinon une exclusivité, pour les oiseaux. On dit qu'elles sont ornithophiles. Certaines s'attaquent à des groupes spécifiques d'oiseaux ou de mammifères, alors que d'autres mordent des animaux de ces deux groupes sans distinction. Ce sont généralement des espèces de ce dernier type qui s'en prennent aux humains. Tout compte fait, peu d'espèces de mouches noires se nourrissent de notre sang et aucune n'est liée exclusivement à l'homme.
La griffe située à l'extrémité des pattes des femelles de la plupart des espèces ornithophiles est munie d'une « dent » à sa base. Celle-ci faciliterait la tâche à l'insecte lorsqu'il cherche à s'introduire entre les plumes pour atteindre l'épiderme de l'oiseau ou à se déplacer à travers son plumage. De façon générale, les griffes des pattes des simulies présentent des adaptations différentes selon que leur hôte est couvert de plumes ou de fourrure. Dix-huit ordres d'oiseaux et huit de mammifères ont été identifiés comme hôtes. De façon générale, les mouches noires sont plus sélectives dans le choix de leur source de sang que les moustiques.
Les mouches noires mordent essentiellement le jour et à l'extérieur. Lorsqu'elles sont très abondantes, les activités de plein air sans protection deviennent pratiquement impossibles durant la journée. Les simulies s'activent davantage en début de matinée et vers la fin du jour. Le deuxième assaut, souvent plus intense que celui du matin, se termine peu après le coucher du soleil. Les mouches noires se reposent durant la nuit.
Si elles entrent par mégarde dans une voiture ou une habitation, les simulies cherchent plutôt à en sortir qu'à soutirer du sang aux occupants. Par contre, elles s'introduisent souvent sous les vêtements et aiment ramper dans la chevelure, piquant surtout à la tête, au cou et aux chevilles. Elles attaquent en silence, sans bourdonnement distinct.
Dans les régions tempérées de l'hémisphère Nord, les mouches noires ne transmettent pas de maladies à l'homme. Les protéines allergènes du fluide salivaire provoquent cependant de l'enflure et une démangeaison. La morsure se présente sous la forme d'une marque ronde, rose et gonflée, maculée de sang frais ou séché. On peut provoquer une infection cutanée secondaire sérieuse en grattant les morsures à répétition.
Selon la sensibilité de la personne, les morsures de mouches noires entraînent une irritation plus ou moins importante. Chez la plupart des gens, il y aura rougeur, douleur, chaleur et gonflement autour du site de la morsure. Cette réaction est normale, et même si elle peut sembler très inquiétante, elle disparaîtra dans les heures ou les jours suivants. Toutefois, si les réactions locales sont très étendues ou accompagnées de fièvre ou d'infection locale, consultez un médecin.
Dans de rares cas, des personnes peuvent avoir des réactions plus violentes aux morsures de mouches noires. La réaction devient anormale et inquiétante lorsqu'elle se manifeste ailleurs qu'au site de la morsure. Les signes d'une réaction grave sont les suivants : enflure au visage, urticaire (rougeur) généralisée, changement de la voix, difficulté à avaler ou à respirer, crise d'asthme, faiblesse, vomissements persistants, perte de conscience ou état de choc. Une telle réaction peut survenir quelques minutes à peine après la morsure et mettre votre vie en danger. Si un ou plusieurs de ces symptômes sont présents, agissez rapidement : administrez l'EpiPen (disponible en pharmacie sans prescription), prenez un antihistaminique (Benadryl) et présentez-vous au service d'urgence le plus proche. Au besoin, appelez le 911.
Les personnes ayant subi une réaction allergique à la suite de morsures de mouches noires risquent d'en subir une autre semblable ou pire si elles sont mordues de nouveau par la même espèce. Si vous avez déjà observé un ou plusieurs signes d'allergie après une morsure, parlez-en à votre médecin. Pour en savoir davantage sur les morsures et les piqûres d'insectes, consultez Gare au dard !
Dans l'est du Canada et le nord-est des États-Unis, des gens victimes de nombreuses morsures peuvent aussi présenter les symptômes de la fièvre de la mouche noire : maux de tête, fièvre, nausée, gonflement et sensibilité des ganglions du cou, articulations douloureuses, lassitude et dépression. Des cas de dermatites ont été rapportés ainsi que des cas d'asthme allergique. Il n'y a toutefois pas de transmission de maladie comme telle.
Sous les tropiques, la situation est fort différente. Les mouches noires y sont la cause de la propagation de l'onchocercose, ou cécité des rivières, une maladie qui peut faire perdre la vue aux gens qui en sont atteints.
L'onchocercose est une filariose, une maladie tropicale causée par un ver parasite spécifique à l'homme appelé Onchocerca volvulus. Plus de 20 millions de personnes seraient infestées par ce parasite en Afrique et en Amérique latine.
L'onchocercose constitue l'une des premières causes de cécité dans le monde. Elle est transmise par une mouche noire, Simulium damnosum, qui a ingéré le parasite en mordant une personne malade. Les vers donnent naissance à des larves qui sont déposées dans la peau quand la mouche mord une autre personne. Les parasites pénètrent ensuite dans les globes oculaires.
La maladie n'est pas mortelle mais elle affecte la peau et les yeux. Les principaux symptômes sont des lésions de la peau associées à la présence des vers dans le derme, des démangeaisons, des nodules gonflés mais non douloureux (souvent aux genoux, sur les côtes, le pelvis ou le crâne), ainsi que des lésions des yeux pouvant mener à la cécité.
Dans certaines régions d'Afrique, jusqu'à 30 % des hommes en âge de travailler sont atteints d'onchocercose.
Les mouches noires sont également vecteurs de diverses maladies qui frappent des oiseaux sauvages et domestiques (dindes, canards, passereaux, hiboux, etc.) ainsi que des mammifères (lapins, vaches, etc.). Les insectes agissent comme transmetteurs en infectant les animaux avec des vers parasites, des protozoaires ou des virus.
La plupart des espèces qui mordent peuvent migrer à une distance considérable de leur lieu d'émergence. Les mâles, qui n'ont pas besoin de sang, s'éloignent en général moins que les femelles. Plusieurs espèces de Simulium dont l'hôte est un mammifère volent sur des distances de 15 à 35 km. D'autres espèces profitent des vents et peuvent parcourir de 150 à 225 km. En Afrique de l'Ouest, les mouches noires transmetteuses de l'onchocercose (voir plus haut) effectuent des déplacements allant jusqu'à 600 km.
Chez plusieurs espèces de simulies des régions tempérées, les mâles forment des essaims durant la période d'accouplement. Grâce à leurs yeux très spécialisés, ils repèrent rapidement les femelles qui s'introduisent dans leur groupe. Avant l'accouplement, le sperme est emmagasiné dans un spermatophore, sorte de sac que le mâle place dans l'orifice génital de la femelle lors de la copulation. Les femelles ne s'accouplent qu'une fois, peu importe le nombre de pontes qui suit.
Les larves aquatiques des mouches noires sont généralement immobiles, accrochées par l'extrémité de leur abdomen à un coussinet de soie qu'elles ont tissé sur un support immergé. Chez quelques espèces, elles se fixent sur le corps d'autres arthropodes (crabes, crevettes, larves d'éphémères). Les larves sont toutefois capables de se déplacer par elles-mêmes et peuvent le faire de deux façons :
elles relâchent les crochets de la fausse-patte abdominale et se laissent emporter par le courant, soit en défilant un fil de soie (un peu comme une araignée suspendue à son fil), soit jusqu'à ce qu'elles soient piégées par un autre fil tendu plus loin ;
elles peuvent bouger en relâchant et en fixant alternativement les crochets de leurs deux fausses-pattes (thoracique et abdominale), un peu à la façon des chenilles arpenteuses.
Les larves se nourrissent en ouvrant largement leurs brosses en forme d'éventails, lesquelles filtrent les particules en suspension dans l'eau. Ces brosses sont couvertes d'une substance collante produite par des glandes situées dans les pièces buccales. Toutes les particules captées sont ensuite poussées dans la bouche et acheminées dans le système digestif. La matière organique est assimilée et les particules non comestibles sont rejetées. Les principaux aliments des larves de mouches noires sont des diatomées et d'autres algues microscopiques, des protozoaires aquatiques et des débris végétaux.
MÉTHODES DE CONTRÔLE
Pour empêcher les mouches noires de mordre, il faut trouver des moyens d'éviter les contacts entre les femelles et leurs hôtes. Il est difficile de s'en prendre directement aux adultes, car ils sont trop dispersés pour permettre l'utilisation efficace d'un insecticide. C'est pourquoi la plupart des approches favorisent l'élimination des larves dans le milieu aquatique, où elles forment souvent de vastes rassemblements.
Contrôle des populations
Au début des années 1980, la lutte biologique contre les mouches noires et les moustiques a été mise de l'avant comme alternative aux approches chimiques. Aujourd'hui, la méthode du genre la plus efficace consiste à utiliser des agents microbiens, en particulier la bactérie Bacillus thuringiensis israelensis ou B.t.i. Une protéine cristalline issue de ce microbe tue les larves de simulies et de moustiques. Cette substance est d'autant plus intéressante qu'elle ne s'attaque qu'aux diptères et qu'elle garde son efficacité même en eau froide.
Les chercheurs étudient également divers virus, bactéries, champignons, moisissures et protozoaires parasites. Ils doivent cependant prendre garde à l'impact de ces larvicides sur l'environnement, incluant leurs effets sur la faune non ciblée (autres insectes, poissons, amphibiens, etc.).
Les larves et les adultes de mouches noires ont de nombreux parasites et prédateurs, mais aucun de leurs ennemis naturels n'est actuellement utilisé comme mode de contrôle biologique.
Protection personnelle
Faute de pouvoir éviter tout contact désagréable avec les mouches noires, chacun dispose de divers moyens pour limiter les nuisances causées par ces insectes.
D'abord, il est bon de rappeler que dans le sud du Québec, les simulies s'activent dès le mois de mai et restent présentes jusqu'en juillet. Ces insectes sont particulièrement actifs le jour et au coucher du soleil.
Durant ces périodes, évitez de sortir sans être vêtu de la tête aux pieds, prenant soin de couvrir poignets, chevilles et cou. N'hésitez pas à insérer le bas des pantalons dans les chaussettes. Laissez de côté les vêtements foncés ainsi que les jeans et portez plutôt des vêtements amples de teintes claires, blancs, jaunes ou kaki. Les couleurs favorites des mouches noires seraient le bleu, le violet, le brun et le noir. Évitez les shampoings odorants, les parfums et les lotions après rasage. Au besoin, portez un filet moustiquaire sur la tête (disponible dans les boutiques de plein air).
Pour protéger les parties du corps exposées, surtout pour les sorties de courte durée, utilisez de préférence des répulsifs doux, comme les lotions, crèmes et autres produits contenant de la citronnelle ou de la lavande. Ces produits ne devraient cependant jamais être appliqués sur les enfants de moins de deux ans, qui risquent davantage d'avoir une réaction allergique. Privilégiez les produits dont la concentration atteint de 4 à 7 %. Suivez les directives du fabricant pour connaître la fréquence d'application recommandée.
Présentement, le produit le plus efficace contre les mouches noires sur une longue durée est le diéthyl-toluamide (DEET). Cette substance agirait en bloquant les récepteurs qui permettent aux insectes de déceler la présence de CO2 émis par une proie. Ce produit peut toutefois causer des réactions graves (problèmes cutanés, troubles neurologiques, mort) lorsqu'il est utilisé en grande quantité, sur une longue période ou par des personnes très sensibles à son contenu (surtout des enfants). La majorité des gens le tolère bien, mais il faut prendre soin de l'utiliser selon les indications du fabricant. Le DEET est un produit puissant qui peut irriter la peau de certaines personnes et endommager divers tissus synthétiques (rayonne, Spandex). Il dissout aussi certains plastiques et il faut éviter que le liquide n'entre en contact avec les montures de lunettes, verres et bracelets de montres, peignes, manches de couteaux de poche, etc.
Il est recommandé d'utiliser le produit ayant la concentration la plus faible, selon la durée de la sortie, et de toujours opter pour des produits atteignant une concentration maximale de 30 % de DEET pour les adultes, et de moins de 10 % pour les enfants de 2 à 12 ans. Il n'est pas nécessaire de choisir les produits qui en contiennent davantage (jusqu'à 100 %) si l'application est répétée. Le répulsif doit être appliqué régulièrement sur la peau exposée, jusqu'à toutes les heures lorsqu'il vente. On trouve également dans le commerce des vêtements imprégnés de diéthyl-toluamide, dont une veste de type parka en coton à tissage lâche qui favorise l'aération.
Malgré l'utilisation de DEET, les mouches noires continuent souvent de voler à proximité des gens, même si elles ne mordent pas.
Les mouches noires ne mordent pas en présence de fumée. Quand la situation le permet, il peut être utile de faire un feu de bois auquel on ajoute des plantes, de la mousse ou du bois vert pour produire de la fumée. Pour les fumeurs, voilà une bonne excuse pour sortir la pipe et en tirer quelques bouffées.
Quand le mal est fait, on peut soulager la démangeaison en prenant un bain auquel on ajoute, au choix, une lotion à l'avoine, 250 ml de bicarbonate de soude ou des produits à base de calamine. On peut aussi appliquer directement sur les morsures un morceau de glace ou du bicarbonate de soude mélangé à un peu d'eau froide.
CROYANCES POPULAIRES
René Limoges
Plusieurs personnes croient que les mouches noires arrachent un bout de chair en quittant leur victime. Malgré l'irritation infligée par les méfaits de l'insecte, il y a là une nette exagération !
Les pièces buccales des simulies sont incapables de mâcher ou d'extraire des morceaux de peau. Elles peuvent par contre couper et percer aisément l'épiderme. La fausse croyance de la chair arrachée vient sans doute de la tache de sang laissée par la mouche noire sur l'emplacement de son repas. La morsure de l'insecte provoque en effet une petite hémorragie sur le site de la blessure, qui résulte de la lacération de la peau de l'hôte par les pièces buccales (voir plus haut : Comportements particuliers).
QUESTIONS FRÉQUEMMENT POSÉES
Pourquoi les mouches noires piquent-elles davantage certaines personnes ?
Divers facteurs, comme le choix des couleurs de vêtements et l'utilisation de produits parfumés entrent en jeu (voir plus haut : Méthodes de contrôle, protection personnelle). Pour le reste, il semble que cette attirance soit une affaire de chimie personnelle ! Les gens nerveux ou qui bougent beaucoup ont une température corporelle plus élevée ; ils laissent échapper plus de gaz carbonique et transpirent davantage que les autres, ce qui stimule les insectes hématophages.
De plus, on devient souvent plus tolérant aux morsures de mouches noires lorsqu'on y est fréquemment exposé. C'est probablement pour cette raison que les mouches noires semblent parfois s'intéresser davantage aux nouveaux venus qu'aux résidants dans les régions où elles abondent.
FAITS INTÉRESSANTS ET CURIOSITÉS
Une centaine seulement des 1 500 espèces de mouches noires connues s'attaquent à l'homme et ont une importance médicale. Elles font partie de trois genres (la famille des Simulides en compte 12) : Prosimulium, Simulium et Austrosimulium. Ce dernier genre est absent de nos régions. Dans l'est du Canada et l'État de New York, les plus importantes espèces qui mordent l'homme sont Prosimulium mixtum Syme & Davies et Simulium venustum Say. Simulium vittatum Zett., considérée aussi comme nuisible et très dérangeante, ne mord pas nécessairement mais forme des essaims autour des personnes. Elle se pose sur le corps, marche sur la peau, se précipite dans les yeux, les narines et les oreilles.
Dans l'est du Canada, le complexe d'espèces Prosimulium fuscum-mixtum apparaît le premier, dès l'éclatement des bourgeons au printemps. La teinte des adultes varie de brun clair à brun foncé, et leurs pattes sont brunes, sans bandes blanches. Ces simulies ne vivent qu'une ou deux semaines. Elles sont ensuite remplacées par les espèces du complexe Simulium venustum-verecundum. Ces dernières ont une coloration plus sombre et leurs pattes noires sont rayées de bandes blanches. Elles s'activent du mois de juin au début de juillet. La situation s'améliore par la suite, même si diverses espèces moins importantes sont présentes.
Au Québec, les insectes hématophages suscitent l'intérêt de plusieurs entomologistes. Afin d'encourager les études et le partage des connaissances sur ce vaste sujet, des scientifiques de l'Université du Québec à Trois-Rivières ont fondé en 1972 le Groupe de recherche sur les insectes piqueurs (GRIP). Le groupe est actif au Québec et au Canada, ainsi qu'au niveau international (Afrique, Vietnam, France, etc.).
Au printemps et au début de l'été, l'apparition de hordes de mouches noires dans nos régions a certainement un impact négatif sur l'économie locale. Malgré qu'il soit difficile à mesurer, on estime qu'il est assez important puisque la présence de ces insectes affecte l'industrie touristique, les travaux forestiers et les travaux des champs. Les mouches noires rendent carrément certaines régions impropres à l'occupation humaine lorsqu'elles y pullulent.
Les morsures de simulies affectent aussi la productivité animale. Lorsque les mouches noires sont abondantes, on note une diminution de la production laitière et de la production de viande due à la baisse d'appétit et à la nervosité accrue du bétail. Dans l'Ouest canadien, la présence de Simulium arcticum et de S. luggeri nuit gravement au bétail des prairies. Une réaction allergique aux morsures de Simulium arcticum a même entraîné la mort de nombreux animaux.
On a trouvé des fossiles de mouches noires datant du milieu de la période jurassique, il y a environ 170 millions d'années.
Les larves qui survivent à l'hiver, sous les latitudes nordiques, sont protégées chimiquement du gel par des substances naturelles contenues dans leur corps. Elles passent la saison froide en état de dormance sous la glace des rivières gelées. Au printemps, quand la température devient plus clémente, elles recommencent à s'alimenter et reprennent leur croissance.
BIBLIOGRAPHIE
Deglise, Fabien. Moustiques : Comment les repousser? Protégez-vous, juillet 2001, p. 17-20.
Si petits, mais si insupportables
Sujet: Re: JARDIN ET LES ASTUCES 
Ven 3 Oct 2008 - 22:34
